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Blog photographique biodégradable

Regards

CO2 et réchauffement

 

 

 

 

ANALYSE - Des mesures mondiales confirment le rôle du gaz carbonique dans le réchauffement planétaire.

 

Par  SYLVESTRE HUET

 

Libération du 16/4/2012

 

 

     

 

 

Le réchauffement climatique qui a abouti à notre ère chaude, il y a 10 000 ans, doit beaucoup au gaz carbonique. C’est l’une des conclusions, sans surprise, d’un article de la revue Nature (1) de jeudi. Mais cette publication permet, pour la première fois, de détailler le scénario de la déglaciation, qui démarre il y a 21 000 ans, dans ses évolutions spatiales et temporelles. Elle éclaire notamment le rôle précis du gaz carbonique (CO2) dans ce processus, et son déclenchement par la mécanique céleste et l’insolation de la Terre. Vues de loin, les relations entre climat planétaire et concentration en CO2 dans l’atmosphère semblent simples. Plus il fait chaud, et plus il y a de dioxyde de carbone. Mais quelle est la cause et quel est l’effet ?

 

 

 

 

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Énergie. Les climatologues pouvaient s’appuyer sur la physique de laboratoire pour répondre «les deux mon capitaine». Le gaz carbonique capte une part des rayons infrarouges émis par le sol et l’océan, bloquant leur énergie au lieu de la laisser s’échapper vers l’espace. Donc, il est cause. Mais il est aussi effet, car une planète plus chaude, en particulier les océans, émet plus de gaz carbonique vers l’atmosphère. Dans les enregistrements simultanés des températures et de la teneur en CO2, dans les glaces polaires, les montées et descentes coïncident : il est difficile de distinguer un décalage temporel qui signerait une causalité. Mais si la courbe du CO2 établie à partir des seules glaces de l’Antarctique est valable pour toute la Terre, celle des températures ne représente que les évaluations locales. D’où l’apport de l’article de Nature à l’échelle planétaire.

Signée de huit scientifiques américains et d’Edouard Bard, professeur au Collège de France et au Cerege (CNRS, Aix-Marseille), cette étude a établi de manière précise et pour la première fois une véritable courbe de température globale de la Terre entre 22 000 et 7 000 ans avant aujourd’hui, à partir des courbes de 80 sites bien répartis sur la planète. Cet «énorme travail, précise Edouard Bard, suppose en effet de résoudre tous les problèmes de calibration en température et en temps permettant de rabouter toutes ces courbes en une seule moyenne». Ensuite, en s’appuyant sur les différences entre ces courbes en fonction de leur localisation (polaires, tropicales, Nord, Sud, océans Atlantique, Pacifique, Indien…), il devient possible de reconstituer le détail du scénario climatique, validé par des modélisations et simulations.

 

Résultat ? La courbe globale de température est décalée d’environ un millier d’années vers le futur relativement à la courbe du gaz carbonique, alors que cette dernière est calée sur celle de la température en Antarctique. Ce décalage temporel démontre que le gaz carbonique joue, à l’échelle globale et pour l’essentiel, un rôle causal tout au long du réchauffement. Les courbes régionales permettent de raconter le détail de l’histoire et de résoudre bien des mystères, en particulier l’énorme différence entre le Nord du 30e parallèle et tout le reste du globe.

 

Il y a 20 000 ans environ, seules les hautes latitudes nord se réchauffent. C’est l’augmentation de l’insolation durant l’été, due à la mécanique céleste, qui y provoque cette «pichenette», dit Edouard Bard. Pichenette qui s’avère la cause initiale du réchauffement.

 

Puis, toutes les régions du globe, sauf les latitudes hautes et tempérées du Nord, subissent une progression des températures grossièrement régulière, après le début de l’augmentation des teneurs en CO2 atmosphérique, il y a 17 000 ans, due au dégazage des océans. Mais pourquoi les latitudes élevées et tempérées de l’hémisphère Nord montrent-elles une diminution des températures après la première montée, vers 17 000 ans, lorsque nos ancêtres décorent la grotte de Lascaux ? Et pourquoi une violente replongée vers des températures glaciales il y a 14 000 ans ?

 

Circulation. «Tout vient du jeu entre les océans et les calottes glaciaires de l’Amérique du Nord et de Scandinavie, explique Edouard Bard. Cette fonte donne parfois lieu à des phénomènes gigantesques. Débâcles massives de glaces. Ou un déversement catastrophique d’un énorme [lac] proglaciaire nord-américain, dit lac Agassiz, vers 13 000 ans [- 11 000 avant J.C.]. Ces phénomènes bouleversent la circulation profonde et superficielle de l’océan Atlantique, qui remonte de l’hémisphère Sud vers l’hémisphère Nord une grande quantité de chaleur en surface, et renvoie du froid en profondeur vers le Sud. Lorsque cette circulation, qui est liée au Gulf Stream, ralentit ou s’arrête, les latitudes tempérées et élevées de l’hémisphère Nord se refroidissent, surtout autour de l’Atlantique.»

 

Cette histoire montre non seulement le rôle causal du gaz carbonique dans la déglaciation, mais aussi que des rétroactions - ici avec les glaces et les océans - peuvent certes retarder la tendance générale, mais pas l’empêcher. Cela pourrait se vérifier dans un futur proche avec une éruption volcanique stratosphérique, à l’image de celle du Pinatubo (Philippines) en 1991, qui a masqué durant deux ou trois ans le réchauffement dû à l’augmentation des gaz à effet de serre, qui est repartie encore plus vite. «Notre étude, conclut Edouard Bard, montre aussi que l’océan n’a pas seulement le rôle de modérateur passif des changements climatiques qu’on lui attribue classiquement. Il peut aussi donner des coups d’accélérateurs.»

 

(1) J. Shakun et al., «Nature» du 5 avril 2012.

 

 

 

 


 

 

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<br /> Bonjour,<br /> <br /> <br /> je trouve votre site particulièrement intéressant. je prépare actuellement une thèse sur le réchauffement climatique et j'aurais aimé savoir si le graphique en page 3 représentant les émissions<br /> de gaz carboniques est réel ou si vous l'avez vous même fait. Je vous demanderai si possible de me transmettre la source de ce graphique pour pouvoir ainsi le justifier, <br /> <br /> <br /> merci d'avance<br />
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